Israël: flash mob anti-ultras
- Écrit par Nathalie Brochard
Les féministes israéliennes ne baissent pas les bras, au contraire, elles les lèvent, et haut! Leur dernière action en date pour contrer les radicaux ultra-orthodoxes (oui ça existe), une flash mob rassemblant 250 femmes à Beit Shemesh, près de Jérusalem : c'est aux accents de Queen et à travers une chorégraphie flamboyante digne des revues de Broadway qu'elles ont exprimé leur désaccord.
Pourtant résister à la tradition n'est pas si simple. La ségrégation instaurée depuis les années 90 dans les bus de certaines villes pourrait bien s'étendre sous la pression de ces religieux extrémistes. Les femmes sont censées s'asseoir à l'arrière des bus, "parce que c'est la place d'une bonne juive" comme l'explique un rabbin, chef d'un parti ultra-orthodoxe. Selon lui, il ne s'agit ni d'une honte ni d'une humiliation. C'est plutôt un signe d'humilité. Car l'humilité et la modestie sont les vertus premières d'une femme juive. C'est d'ailleurs ce qui a enflammé l'opinion publique israélienne émue par l'histoire de Naama Margolese, huit ans, harcelée sur le chemin de l'école par les juifs radicaux qui l'ont insultée et lui ont craché dessus au motif que sa tenue était "immodeste". Les principes du judaïsme orthodoxe stipulent que les femmes doivent porter des manches et jupes longues. Si ces règles deviennent insupportables pour de nombreuses femmes qui préfèrent quitter ces endroits rétrogrades, d'autres entrent en résistance. La mère de Naama a pris la tête d'un vaste mouvement citoyen et dans tout le pays, les manifestants protestent contre les discriminations dont les femmes font l'objet. Le gouvernement de Benyamin Netanyahou, qui a longtemps laissé faire, se veut rassurant et explique, en parlant des radicaux ultra-othodoxes, que ces comportements restent marginaux. Il a toutefois ajouté que " le harcèlement et la discrimination envers les femmes n’ont pas leur place en Israël".
La menace n'a, semble-t-il, pas impressionné les extrémistes puisque le 31 décembre dernier ils défilaient à nouveau et dans leur cortège, on pouvait voir des manifestants en tenue rayée de déporté arborant l‘étoile jaune, provoquant la stupeur en Israël. Le gouvernement et le directeur du Mémorial de Yad Vashem ont immédiatement réagi et ont condamné cette atteinte au souvenir de la Shoah.
Associations féministes et laïques se retrouvent pour tenter de lutter contre la force du fait religieux, contre un mouvement qui interdit aux individus d'être sujets agissants, pour défaire le lien étroit qui existe entre tradition et religion, pour éviter que religion et tradition ne se confondent et soient au coeur du quotidien des gens, le régissent et gomment l'humain. Ce combat pourrait prendre plus d'ampleur car il touche la société israélienne dans son ensemble. L'exemple de la publicité est très symptomatique : les féministes se sont récemment opposées, avec succès, à la pratique tacite de certains publicitaires qui consistait à faire disparaître les images de femmes des affiches dans les villes fortement religieuses, notamment à Jérusalem, sous la pression de la communauté "harédim" (juifs ultra-orthodoxes, littéralement "craignant Dieu"). A travers le monde, les luttes féministes ont sans doute le même fond mais pas toujours la même forme...