Inde: le procès de la honte
- Écrit par Nathalie Brochard
C'est ce lundi 7 janvier que s'ouvre le procès des cinq hommes poursuivis pour le viol et le meurtre d'une étudiante dans un bus à New Delhi, la justice disposant de preuves de leur implication dans ce crime qui a révolté l'Inde et la communauté internationale. S'ils sont reconnus coupables, ils encourent la peine de mort. L'agression a suscité une vague d'indignation, la population indienne excédée des violences faites aux femmes et de l'inertie d'une justice et d'une police face à ces crimes.
Les cinq accusés, Ram Singh, Mukesh Singh, Vijay Sharma, Akshay Thakur et Pawan Gupta sont majeurs, le sixième qui n'a que 17 ans doit être jugé par un tribunal pour mineurs. Devant la colère des Indiens, la procédure a été accélérée. Les accusés comparaîtront un peu plus d'une semaine après la mort de la jeune femme de 23 ans. Dans la plupart des procès pour viol, les prévenus comparaissent plusieurs mois après les faits. Pour autant, la sentence ne tombera pas si vite car la cour du district de Saket devrait transférer l'affaire à un autre tribunal, compétent en matière de viol et de meurtre.
La victime, dont l'identité n'a pas été révélée conformément à la loi, avait passé la soirée au cinéma avec son compagnon. Après avoir tenté en vain d'arrêter plusieurs rickshaws, le couple était monté dans un bus normalement réservé au transport scolaire mais qui était occupé par un groupe d'hommes. Les six hommes présents dans le véhicule ont alors violé l'étudiante avant de la battre, ainsi que son petit ami, à coups de barre de fer, puis de les éjecter du bus, selon l'accusation.
Samedi, l'accusation avait indiqué que les traces de sang retrouvées sur les vêtements des accusés correspondaient à celui de la victime. Le compagnon de la jeune femme a témoigné auprès de la police et reconnu les personnes arrêtées comme étant les agresseurs, selon la presse. Dans un entretien à l'AFP et à la chaîne de télévision indienne Zeenews, le petit ami, grièvement blessé dans l'attaque, a dénoncé le temps perdu par la police et l'indifférence des passants. Il a expliqué qu' "il y avait quelques personnes qui se sont rassemblées mais personne ne nous a aidés. Avant l'arrivée de la police, j'ai crié pour demander de l'aide mais les pousse-pousse, les voitures et les autres passants ne se sont pas arrêtés". "Cela a pris une heure et demie avant que nous ne soyons transférés à l'hôpital", a-t-il estimé. Après son intervention télévisée, les internautes ont réagi sur les réseaux sociaux en disant la honte qu'ils avaient de leur propre pays.
La nature ignoble de ce crime nourrit actuellement les médias indiens et pointe du doigt les incohérences et exactions d'un système patriarcal à l'extrême où la logique de domination masculine ne peut qu'aboutir à l'élimination physique de femmes. Aujourd'hui, la société indienne en prend conscience et réclame une meilleure protection des femmes. Rappelons qu'à Dehli, un viol est commis toutes les 20 minutes...
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