La ségrégation légalisée en Espagne
- Écrit par Nathalie Brochard
Cinq collèges privés catholiques de Galice en Espagne qui séparent filles et garçons dans les classes et dispensent une pédagogie différenciée, contrevenant ainsi au principe d'égalité des sexes en matière d'éducation tout en bénéficiant de subventions publiques, pourraient voir leurs pratiques légalisées par un aménagement de la loi Wert au grand dam des syndicats d'enseignant-e-s.
L'affaire ne date pas d'hier. Les collèges en question, affiliés à l'Opus Dei, font traîner les recours juridiques lancés par les enseignant-e-s du public. Et si le Tribunal Suprême a clairement dit que toute discrimination basée sur le sexe des élèves était interdite, il n'en reste pas moins que les adeptes de l'éducation différenciée par genre (à savoir non-mixité des classes et pédagogie différente selon le sexe des élèves) entendent choisir le système qu'ils souhaitent pour leurs propres enfants. Et le font savoir. Au point que le gouvernement de Galice temporise… et continue à verser les subventions à ces cinq collèges.
Les syndicats de leur côté ne décolèrent pas. Avant le vote de la LOMCE (Loi organique pour l'amélioration de la qualité de l'éducation en Espagne) ou loi Wert du nom du ministre de l'éducation, l'ensemble de la communauté enseignante, qui n'avait pas du tout été associée à sa rédaction, s'était mobilisée pour empêcher la privatisation du système éducatif espagnol et l'abandon des valeurs citoyennes qui structuraient l'école. Aujourd'hui, alors que les établissements publics ont subi des coupes drastiques dans leur budget de fonctionnement, certaines écoles privées aux pratiques illégales reçoivent des aides publiques…
José Wert, le ministre de l'éducation, a, pour sa part, annoncé que des aménagements légaux permettant d'inclure l'éducation différenciée à l'offre scolaire espagnole sont en cours de préparation. Les députés d'opposition au gouvernement conservateur de Mariano Rajoy s'interrogent pour savoir si les fonds publics perçus avant le vote de la loi Wert seront remboursés. Le sentiment d'impunité semble l'emporter: l'Opus Dei poursuit son expansion à l'aune du "sectarisme idéologique radical" de l'exécutif du PP selon les socialistes. Le syndicat enseignant CIG déplore que "soit soutenue une éducation qui perpétue les inégalités entre hommes et femmes".
Photo DR. Une salle de classe en Espagne dans les années 40.