updated 8:25 PM CEST, Apr 25, 2016

C'est l'amour à la plage

Le sea, sex and sun est le refrain préféré des magazines féminins pendant la période estivale qui multiplient les tests coquins et autres sexo-quiz à destination des lectrices qui pourront enfin se situer par rapport à la norme en lisant les résultats. Des sociologues, flairant le bon filon, ont eux aussi choisi de sortir ceux de leurs recherches sur le sujet de l’été : le couple et l’amour.

Parce que la saison est propice aux tenues légères, aux apéros qui durent et aux (d)ébats qui s’ensuivent, la presse féminine consacre chaque été, une place importante à l’amour dans tous les sens, relations de couple et sexe compris. On n’y coupe pas. Rien de bien transcendant, c’est un peu toujours la même rengaine avec son lot d’injonctions : Le faites-vous assez ? Combien d’orgasmes avez-vous ? Votre partenaire est-il satisfait ? Et de vous donner quelques conseils mine de rien pour devenir en deux temps trois mouvements la reine de la fellation ou pour bien "vous détendre avant la sodomie" (sic). Cette année pourtant, Cosmo remporte la palme en proposant un kamasutra lesbien en 28 positions (illustrées pour celles qui ne savent pas lire entre les lignes, parce que bon c’est complexe). A y regarder de près, on se dit que le/la graphiste a juste remplacé le corps de l’homme par celui d’une femme sur les positions destinées aux couples hétéros et qu’il lui a rajouté un gode-ceinture pour faire plus vrai. Cela n’a d’ailleurs pas échappé aux réseaux sociaux qui se sont enflammés aussi sec en incendiant le magazine qui s’est réfugié, piteux, derrière sa bonne foi. Pas facile de se mettre dans la sexualité des autres. Ah oui vraiment ?

Sociologues en tête de gondole
Bref, on n’apprend rien dans ces journaux à ce niveau et on comprend qu’il s’agit surtout de business facile pour les groupes de presse. Au point que les éditeurs de certains sociologues se sont dit que sortir des travaux sur le sujet en été pouvaient s’avérer payant pour eux aussi. C’est le cas de Flammarion et Stock qui mettent en tête de gondole, respectivement, Claude Habib, professeure à l’université Sorbonne-Nouvelle et Marcela Iacub, directrice de recherche au CNRS, pour leurs études sur le couple. Certes les universitaires aboutissent à des conclusions opposées : Claude Habib, autoproclamée «conjugaliste», prône l’ennui comme garant de l’amour éternel et s’attaque aux valeurs actuelles de la société, à la consommation, l’individualisme et l’égalitarisme. Pour Marcela Iacub au contraire, l’égalité est un passage obligé pour l’accomplissement de chacun-e. Quant au couple, elle estime que c’est «un tombeau», principalement pour les femmes. Elle prône de nouveaux modes relationnels plus égalitaires, plus collectifs, type phalantères de Fourier, pour enfin rompre avec la structure du couple bourgeois héritée du XIXe siècle. Deux conceptions radicales donc… Et c’est pour leurs idées tranchées que les éditeurs les sortent du lot dans l’espoir que les vacanciers enfin déconnectés fassent le point sur leur couple et choisissent leur auteure pour les mener à la vérité.

Pour les lecteurs-trices qui cherchent des réponses tangibles à leurs questions existentielles, rien n’est gagné et du coup, mieux vaut encore s’en tenir aux chiffres façon Beatriz Preciado (suivant, à l’instar de ses collègues, la tendance de l’été) qui observe le début de la fin de ses amours à l’aide de statistiques. C’est tout autant radical mais plus fiable. A vous de voir.

Œdipe reine, Marcela Iacub, Stock, 144 pages
Le Goût de la vie commune, Claude Habib, Flammarion, 175 pages


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