Les guerilla girls ont 30 ans
- Écrit par Hellen Williams
Les Guerrilla Girls ne peuvent encadrer aucune des discriminations ternissant le monde de l’art. C’est pourquoi, depuis 1985, ce collectif américain d’artistes anonymes féministes, dont le signe distinctif est un masque de gorille, «refait» joyeusement le portrait aux autorités et institutions culturelles. Autrefois craintes, aujourd’hui courtisées, les Guerrilla Girls ne se laissent toujours pas caresser dans le sens du poil. Quand Pharell les invite pour son expo GIRL à Paris l’été dernier, elles n’acceptent que pour mieux dénoncer l’ultra sexisme des vidéos musicales et des conservateurs de galeries, en actualisant deux des Guerrilla posters les plus connus. Fêtons leurs 30 ans d’activisme dans la brume, avec une auto-interview issue de leur site web !
Comment a commencé l’aventure des Guerrilla Girls?
En 1984, le Musée d’Art Moderne de New York (MOMA) présentait l’exposition Une Etude Internationale de la Peinture et de la Sculpture, soit disant une synthèse actualisée de l’art contemporain le plus significatif au niveau mondial. Sur 169 artistes, seules 13 étaient des femmes, et tou-te-s étaient blancs, d’Europe ou des Etats-Unis. Pour Kynaston Mc Shine, conservateur, les artistes qui n’y figuraient pas devaient reconsidérer leur carrière. Cette réaction aussi sexiste que raciste, et l’indifférence générale du public et des institutions face aux préjugés flagrants de l’exposition nous ont énervées. C’est là que nous avons décidé de nous réapproprier la tradition du vengeur masqué pour mener des actions destinées à secouer les consciences en combattant stéréotypes et discriminations.
Que faites-vous à part des posters ?
Les posters sont notre arme de communication la plus connue, mais nous organisons aussi des manifs, et créons des affiches, des publicités sur les bus, des reportages dans les magazines, des autocollants et des campagnes d’envois de lettres.
Quelle est la philosophie à la base de votre activisme ?
Nous essayons de nous différencier d’un art colérique qui souligne ce qui ne va pas. Nous voulons être subversives, bousculer notre public avec des déclarations basées sur des faits avérés, et réussir à le conscientiser. Mais toujours avec humour, histoire de démolir le cliché de la féministe pas drôle…
Vous détestez la terminologie descriptive de l’art. Qu’est-ce qui cloche avec «tableau de maître» ou «génie artistique» ?
Si un tableau de maître ne peut être produit que par «un homme possédant de l’autorité» vous voyez où est le problème… Quant au mot «génie», il provient de «testicules» en latin. Cela explique peut-être pourquoi il est si rarement utilisé pour une femme !
Comment peut-on faire partie des Guerrilla Girls ?
En vous associant à nos actions partout où vous êtes ! Téléchargez et imprimez nos autocollants et posters puis collez-les partout dans votre ville ! Inspirez-vous de nous en choisissant un nom de code scandaleux et affichez autour de vous les posters qui vous touchent le plus. Si ça marche, recommencez. Si ça ne marche pas, aussi. Et inscrivez-vous à notre newsletter pour tout savoir de nos prochaines actions !
Comme elles l’affirment elles-mêmes : nous sommes peut-être l’une d’entre vous, nous sommes partout ! Guerrilla Girls : Gare au gorille….
A lire : Bitches, Bimbos and Ballbreakers: The Guerrilla Girls' Illustrated Guide to Female Stereotypes, New York : Penguin, 2003
The Guerrilla Girls' Bedside Companion to the History of Western Art, New York : Penguin, 1998