Selfridges invente l'a-gender marketing
- Écrit par Nathalie Brochard
Les magasins Selfridges, toujours précursseurs en matière de mode et de marketing lancent Agender, un concept unisexe qui efface les frontières homme/femme. Révolution ou poudre aux yeux ? Poule aux œufs d’or, à n’en pas douter.
Les lignes sont-elles en train de bouger ? Le department store de luxe Selfridges lance un rayon de mode unisexe dans ses magasins de Londres, Manchester et Birmingham. Agender, concept créé par la designer Faye Toogwood, parle de lui-même : sans genre. L’espace a été pensé en ce sens avec la volonté de casser les sempiternelles catégories homme/femme. De l’avis de la créatrice, «le genre n’est pas simplement binaire, mais les vêtements sont toujours vendus selon ces critères. Il suffit de regarder la prépondérance du rose et du bleu au rayon enfant pour voir comment les choix que nous faisons renforcent des rôles genrés artificiels».
Dans un communiqué, Selfridges explique que l’idée est d’offrir «une expérience à ses clients pour s’habiller en dehors de toutes contraintes ou stéréotypes». Et si l’industrie de la mode s’aventurait parfois hors des sentiers battus en faisant défiler sur les podiums des mannequins transgenres ou transexuels, les collections restaient jusqu’à présent très normées. Il y avait toujours d’un côté les vêtements pour hommes de l’autre les vêtements pour femmes. Casser cette frontière est une gageure.
Afin de promouvoir sa campagne, Selfridges a mis le paquet en faisant appel à Neneh Cherry et Devonté Hynes qui interprètent le titre He She Me : le message véhiculé est d’abord d’être soi-même avant de se conformer à son genre biologique, masculin ou féminin. Et si Agender n’est pas «une tendance» comme l’affirme Linda Hewson, directrice créative de Selfridges mais «un état d’esprit», il est difficile d’oublier que Selfridges doit faire du profit. Et il est de fait légitime de se demander si Agender ne s’inscrit pas dans un plan marketing bien orchestré comme s'y entend le department store. Linda Hewson précise d’ailleurs que «le projet doit servir de berceau à des tests autour de l’idée de genre, à la fois pour permettre à nos client-e-s de vivre l’expérience sans idées préconçues et pour nous en tant que vendeurs de faire avancer notre façon de voir la mode». Alors Selfridges vient-il de lancer l’a-gender marketing ?
Photo © Selfridges