IVG, le grand pardon version catho?
- Écrit par Nathalie Brochard
Le Vatican, désormais habitué, sous le règne de François, à la politique du pas en avant puis deux en arrière, remet le couvert sur la question de l’avortement. A l'occasion du prochain "Jubilé de la miséricorde", les femmes qui ont avorté et les personnes qui les ont aidées pourront être absoutes. Cette initiative ne revient toutefois pas sur la définition de l’avortement qui reste un péché aux yeux de l’église catholique.
Dans la religion catholique, ce jubilé, qui va de décembre 2015 à novembre 2016, offre aux fidèles d'obtenir le pardon de leurs péchés. Petite révolution dans ce rituel millénaire, le coordinateur de l’événement, l'archevêque Rino Fisichella, a communiqué à la presse que l'avortement en ferait partie : "Parmi les possibilités de pardon accordées aux missionnaires de la miséricorde, il y aura aussi l'avortement". En effet, tout au long de cette "Année sainte", des cohortes de prêtres seront envoyés comme "missionnaires" pour apporter la miséricorde aux croyant-e-s, c’est-à-dire le pardon. Jusqu'à présent, l'avortement, faute grave punie d'ex-communication automatique, n’était pardonné qu’à certaines conditions et lors de moments bien précis dans le calendrier liturgique comme l'Avent (avant Noël) ou le Carême (avant Pâques), ou lors d’événements symboliques comme actuellement l'ostension du Saint-Suaire du 19 avril au 24 juin prochain dans le diocèse de Turin, a rappelé le cardinal. Ce pardon pourrait être accordé aux femmes ayant avorté, mais aussi aux médecins qui ont pratiqué l’acte. Ils/elles devront pour cela exprimer un "vrai repentir".
Afin de prévenir tout dérapage ou malentendu, Mgr Valasio De Paolis a d’emblée recadré la dimension de l’initiative papale : «L'avortement reste un péché, et le pape n'a pas décidé de l'abroger, a-t-il déclaré au journal florentin La Nazione. Et si l'Eglise catholique veut se positionner par rapport aux avortements pratiqués suite à des viols, elle s'y prend mal et les plus conservateurs de ses leaders lui interdisent d'évoluer sur le sujet comme elle voudrait. On se souvient du scandale au Brésil en 2009 provoqué par l’ex-communication d’une mère et des médecins qui avaient fait avorter une fille de neuf ans, violée par son beau-père. Le Vatican avait alors soutenu l'archevêque de Recife dans sa décision qui estimait que le viol était "moins grave que l'avortement". Le tollé avait été à la hauteur de l’injustice et du crime commis.
En matière d’avortement, le Vatican pratiquerait volontiers un double discours, comme pour l’homosexualité, plutôt que d’aborder sereinement ces problématiques. Du coup, les marges de manœuvre restent limitées et les croyant-e-s restent eux/elles sur leur faim.
© Eloïse Bouton, Femen.