updated 8:25 PM CEST, Apr 25, 2016

Insultes et préjugés

Voici deux semaines, on avait eu droit au beach body, il y a huit jours, le dad bod et son corollaire le mom bod. Symptôme saisonnier à l’approche de l’été ou concentré de sexisme et de préjugés variés ? Toujours est-il que les réseaux sociaux se délectent de ces morceaux de choix qui sont jetés en pâture à des internautes toujours ravi-e-s de donner leur avis.

Le dad bod ou ventre de papa vient des Etats-Unis (surprise !). Non pas d’une de ces études commandées à un obscur labo indépendant qui tire des conclusions hâtives à partir de pauvres tests commis sur deux-trois cobayes égarés et mal payés, non ça vient du cerveau lumineux de Mackenzie Pearson, une étudiante âgée de 19 ans de l’Université de Clemson (Caroline du Sud) qui a publié sur le journal en ligne de la fac un petit texte intitulé “Why Girls Love The Dad Bod” (Pourquoi les filles aiment le dad bod, ndlr). Elle y explique les raisons de préférer les garçons bedonnants : plus doux, moins cavaleurs, meilleurs faire-valoir. Après les réseaux sociaux qui se sont emparés du débat, le Washington Post l’a carrément érigé en mouvement de société.

Parler de sexisme à ce propos relève de l’évidence, à commencer par la différence de traitement qui est ici faite entre les corps masculins et féminins. Si les femmes en surpoids n’ont que peu de chance d’être valorisées, les hommes en revanche restent «sexy» avec la bedaine. Le corps parfait pour les unes passe par la minceur et la beauté tandis que pour les autres, le muscle est la norme. Un peu de ventre reste associé à une forme de virilité. L’injonction à la minceur pour les femmes s’inscrit dans un système de contrôle social permanent qui pèse sur elles dans tous les espaces (privé et public). Les hommes sont libres de se goinfrer, de sécher les cours de pilates, sans jamais craindre de se faire plaquer pour un embonpoint quelconque.

Quant au critère de l’âge que Mackenzie Pearson a introduit dans son appellation, là encore, la différence est flagrante. Si l’image paternelle rassure, celle de la mère est repoussoir. Au point qu’une journaliste du New-Yorker, Susan Orlean, s’est même demandé si le terme «mom» (maman, ndlr) ne devenait pas un gros mot. Et de répertorier les expressions qui allaient dans ce sens. Tout ce qui est «mommy thing» est ringard, antisexy avec en point d’orgue le mom jean, emblème des années 90.

Alors vous êtes une femme, mère, avec des kilos en trop et vous perdez votre confiance en vous ? Qu’est-ce qui vous reste ? Un hashtag # momisbeautiful ? l’émiliE pencherait pour #everybodysperfect.

Photo DR