La fin d'Agenda 21?
- Écrit par Nathalie Brochard
La perspective de la suppression du service Agenda 21-Ville durable de la Ville de Genève et des UAC inquiètent les associations engagées dans les domaines de l'égalité, de la diversité, de la lutte contre l'homophobie et la transphobie, de l'économie sociale et solidaire, de l'agriculture de proximité, de la participation citoyenne ou de l'insertion par l'activité économique. Face à ce retour en arrière dommageable pour la société toute entière, différents mouvements de protestation s'organisent. Virginie Studemann, présidente du Parti socialiste Ville de Genève et conseillère municipale, nous détaille les enjeux de la disparition annoncée d'Agenda 21.
l'émiliE: Si le budget de la Ville est en équilibre, comment expliquez-vous ces coupes budgétaires ?
Virginie Studemann: C'est un rapport de force politique. Quand le premier projet de budget a été présenté en septembre avec 25 millions de déficit, le PDC, l'UDC et le MCG refusaient d'entrer en matière sous prétexte que le projet de budget n'était pas équilibré. Quand le deuxième projet de budget a été présenté en novembre avec un bénéfice de 43'822 francs, la droite et l'extrême-droite se sont opposées au projet en réclamant un bonni. Sous l'apparence d'un discours technique financier, la droite et l'extrême droite veulent attaquer les choix politiques d'un Conseil administratif à majorité de gauche et à l'administration municipale.
La raison en serait-elle idéologique ? C'est toujours plus facile d'économiser sur l'égalité, la diversité ou l'écologie, non ?
C'est une question de valeurs. Rappelons qu'un élu MCG a déclaré en séance plénière que les homosexuels étaient des pédophiles sans aucune réaction du PDC, du PLR et de l'UDC. Les politiques pour l'égalité homme-femme, la lutte contre l'homophobie, le racisme et la xénophobie, ont toujours été attaquées par le MCG. La nouveauté, c'est que l'Entente les suit alors que jusqu'à présent, elle se contentait de dire que ce n'était pas le rôle de la Ville. Ce qui au bout du compte revient à ne pas reconnaître le besoin d'agir et à ne pas soutenir les actions dans ces domaines.
La suppression des UAC et d'Agenda 21 signifie-t-elle que tout a été fait dans ces domaines et que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ?
Les UAC, c'est l'action sociale communautaire, la cohésion sociale et une réponse adaptée aux besoins des habitant-e-s dans chaque quartier. Face aux difficultés économiques et aux crises identitaires, nourries par les partis d'extrême-droite, nous avons plus que jamais besoin de cohésion sociale et la politique de la Ville est complémentaire à l'approche cantonale de l'action sociale individualisée.
Concernant le service Agenda 21, il faut rappeler que cela ne concerne pas que l'écologie. Sandrine Salerno a intégré toutes les dimensions du développement durable et a engagé l'action en faveur de la diversité, de l'égalité mais aussi le soutien à l'économie sociale et solidaire. Cela nécessite des changements en profondeur des mentalités. Un travail de longue haleine qui apparaît clairement comme un luxe à la droite élargie. C'est pourtant une nécessité, et de plus en plus, une urgence sachant que, dans le domaine par exemple de l'égalité H-F et LGBITQ, nous devons résister aux propositions réactionnaires avant même de progresser !
Avec ce coup d'arrêt, quel signal, quelle image donne Genève à l'international selon vous, après avoir accueilli la 7ème Conférence européenne des villes durables ?
Les engagements de la Ville de Genève sont multiples : la Charte d'Alborg, avec plus de 1200 membres et 80 pays ; la Charte européenne des Droits de l'Homme dans la Ville avec plus de 400 Villes signataires dont Saint-Denis, Barcelone, Lyon et Nantes ; le réseau des Cités interculturelles, dépendant du Conseil de l'Europe et la Charte de la diversité. Autant d'engagements qui renforcent la position internationale de la Ville. Les attaques de la droite fragilisent l'image de notre Ville à l'extérieur et envoient un mauvais signal à la communauté internationale implantée à Genève.
N'est-ce pas du gâchis, selon vous ?
C'est un gâchis démocratique qui a le mérite d'ouvrir les yeux. Il ne s'agit pas de réagir uniquement quand des services sont menacés, d'autres coupes budgétaires moins voyantes menacent régulièrement ces politiques. Certain-e-s élu-e-s de droite ont intégré ces thèmes dans leurs discours et ont créé l'illusion d'un consensus politique. Le véritable engagement, c'est le financement de ces actions, le soutien financier aux associations. Le débat actuel a le mérite de montrer qui s'engage véritablement. C'est aussi l'occasion pour les mouvements militants et les associations de se mobiliser.
© Photo Joanna Osbert
AGIR
Une manifestation publique sera organisée lundi 25 novembre à 16h30 devant le Conseil municipal de la Ville de Genève (rue de l'Hôtel-de-Ville, face aux Canons), à l'occasion de la dernière séance du Conseil municipal avant le vote du budget le 16 décembre.
Vous pouvez aussi signer l'appel "Non aux coupes" et le renvoyer à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. , si possible avant lundi 25 novembre 12h.