Distinction
Voilà, le printemps est là, laissant derrière lui quelques journées de la femme rassurant les bonnes consciences et des St-Valentin rassurant les fleuristes. Comme tous les hivers, heureusement déjà un peu oublié, celui-ci aura été marqué par les récompenses que s'auto-octroit le cinéma. Tout le monde l'aura noté, The Artist, blague en forme d'hommage par le réalisateur d'OSS 117 et le producteur d'Astérix aux Jeux Olympiques, aura remporté le gros des prix. Mais on aura aussi remarqué que Meryl Streep, pour sa transformation en Margaret Thatcher dans Iron Lady, s’est aussi taillé la part du lion. Or, si l'on peut saluer le talent mimétique de l'actrice, on peut difficilement être attendrie par la vision sympathique «mamie gâteuse» à laquelle l'actrice donne un semblant d'humanité. Les hagiographies ont ceci de tristes qu'elles ne citent que comme détails historiques – et de peu d'importance - les inconséquences émaillant une vie publique.
On en oublierait presque que Margaret Thatcher, loin d'évoquer la réussite de la femme politique, c'est avant tout le symbole d'une société forcée d'accepter les diktats du monde financier et la soumission aux grands groupes industriels. Pourtant, ce qu'a voulu nous apprendre le film, c'est que la droite réactionnaire est profondément féministe et qu'elle est bien plus progressiste que la vilaine gauche qui n'a jamais pensé à mettre une dame au pouvoir. En 2012, l’histoire se réécrit comme comme ça... La vacuité politique héritée des années Reagan est devenue le mode d'emploi de l'écriture d'un scénario et d'une vision neutre.
A propos de récompenses, une amie me faisait remarquer récemment qu'il y a avait toujours des prix pour les interprètes féminines et masculins. Alors qu'il n'y a pas de distinction de sexe entre les autres métiers du cinéma. Est-ce à dire que les femmes et les hommes ont une manière de jouer différente ? Ou plutôt, comme on peut le penser, que les actrices n'ont qu'un minimum de bons rôles sous la main, ce qui mérite bien une section pour elles seules sinon elles ne seraient jamais reconnues par leurs pairs ? Un peu comme dans la vraie vie finalement.
- Écrit par Christophe Billeter